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Françoise

Mon premier accompagnement en soin palliatifs

Ce témoignage se trouve développé

dans le livre « Oser l’espérance »

(Témoignages de 18 femmes), auquel

Françoise a apporté sa contribution.

Ce livre a été publié chez Farel, en 2005,

par l’association « Femmes 2000 ».

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Depuis ma conversion, en février 1965, j’ai été préoccupée par la mort spirituelle de ceux que je côtoyais. Dieu avait mis en moi le fardeau des âmes perdues, et le Seigneur m’a permis maintes fois de rendre témoignage de ma rencontre avec lui. J’étais vraiment heureuse de lui appartenir et je voyais mon travail professionnel de l’époque non plus comme une corvée, mais comme un moyen d’évangéliser autour de moi. Je le faisais en offrant une Bible, ou le livre « La Paix avec Dieu » de Billy Graham, mais aussi en écoutant et en prenant part à la souffrance des autres.

 

Fin août 1966, je suis venue passer une semaine chez ma sœur à Namur et le dimanche matin je suis allée au culte avec sa famille. C’est à la sortie de ce culte que j’ai rencontré celui qui allait partage ma vie depuis 50 ans. De cette union devaient naître nos trois filles, qui nous ont aujourd’hui donné trois petits-fils.

 

Notre rencontre n’a pas été le fruit du hasard, mais une réponse aux prières que tous les deux, chacun dans notre pays, nous avions adressées à Dieu. Roger venait de terminer ses études d’ingénieur en agronomie tropicale. Après une remise en question sur le plan spirituel, la conviction d’abandonner une offre d’emploi très bien rémunéré au Congo, s’est imposée, car nous avions déjà pris conscience des besoins existant dans les missions et plus particulièrement dans le domaine de l’enseignement. Pour Roger, le statut de volontaire dans la mission pentecôtiste suédoise au Burundi allait nous octroyer le même salaire qu’un enseignant autochtone, c’est à dire seulement de quoi manger comme les africains…

 

Plus que tout autre chose, nous partagions l’un et l’autre la volonté de servir le Seigneur avec un conjoint qui partagerait ce même désir et les mêmes valeurs spirituelles. C’est donc animés par la même foi, que nous nous sommes mariés et que nous sommes partis au Burundi, en septembre 1967. Roger allait enseigner dans l’école normale de la mission. Pour ma part, n’ayant pas de qualification spécifique, j’ai accompli un travail de secrétariat, donné le cours de gymnastique aux filles de l'école, ou rempli diverses tâches, selon les besoins du moment.

 

Au cours de ces trois années au Burundi, le Seigneur a mis à cœur de Roger de se former pour entrer dans le ministère pastoral. Ce qu’il a pu concrétiser en entrant à la Faculté de théologie évangélique de Vaux-sur-Seine. C’est durant cette période que nous avons pu concrétiser notre désir de fonder une famille, et que j’ai mis au monde notre première fille. Les trois années passées au Burundi nous avaient appris à vivre sans grands besoins ; et cette « école » nous a été à la fois utile et bénéfique dans la suite de notre vie.

 

Quelques années plus, nous avons été amenés à reprendre l’Église évangélique d'Ath qui cherchait un nouveau pasteur. Par la suite, nous avons décliné d'autres opportunités, avec la conviction d’être toujours à la place que le Seigneur nous a choisie dans l’église d’Ath, si bien que nous y œuvrons encore aujourd’hui : Dieu seul sait pour combien de temps encore.

 

Pour ma part, depuis ma conversion en février 1965, le Seigneur m’a accordé un ministère d’accompagnement, d’écoute, de visites à domicile, dans les homes, dans les hôpitaux. J’ai toujours été interpellée par les personnes en souffrance, que ce soit une souffrance physique, morale, affective ou spirituelle. Finalement toutes ces souffrances s’imbriquent les unes aux autres, car elles sont interdépendantes et conduisent beaucoup de personnes à vivre une grande solitude intérieure, d’où mon souci pour leur devenir spirituel dans l’au-delà.

 

Je sais aussi que toutes les personnes que je rencontre depuis tant d’années ne sont pas le fruit du hasard, mais Dieu me fait la grâce de pouvoir les Lui présenter dans la prière, et d’intercéder pour ces personnes qui, pour la plupart ne connaissent pas Dieu, le connaissent mal, où sont en révoltes contre Lui… Lui dont elles disent souvent qu'Il n'existe pas!

 

C’est en 2000 que s’est présenté à moi l’opportunité de faire une formation bien spécifique d'accompagnement en soins palliatifs pour accompagner les personnes en fin de vie. Mais ce n’est pas sans une certaine appréhension que j’ai commencé mon premier accompagnement.

 

La plate-forme des Soins Palliatifs de Tournai m’avaient bien donné quelques renseignements sur la personne : une jeune femme de 33 ans qui avait demandé une bénévole pour l’accompagner dans sa maladie : un cancer généralisé. J'avais aussi quelques renseignements sur le contexte familial : notamment une situation de concubinage avec un conjoint alcoolique ! Je me rappellerai longtemps ce matin de juin ou eut lieu ma première rencontre avec D. : dehors le soleil brillait, les oiseaux chantaient, il y avait les fleurs, la vie…

 

Dedans c’étaient des murs blancs, pauvres et froids. Dans un coin de la pièce, un lit et dans ce lit une jeune femme squelettique et d’une tristesse tellement intense qu’une faction de seconde je me demandai si j’allais être capable de faire cet accompagnement. Mais très vite j’ai senti que le Seigneur venait à mon secours en me procurant cette force que donne l’empathie pour m’approcher tout près d’elle, physiquement mais aussi moralement, affectivement. Nous avons commencé un cheminement respectueux mais intensif, car la mort n’allait pas attendre longtemps pour la ravir au monde des vivants.

 

Très vite, j’ai découvert en D. beaucoup de qualités : une extrême sensibilité aux gens, aux choses, à la nature toute entière, un amour du beau, un amour passionné pour les fleurs et en particulier pour les roses dont elle connaissait en partie tous les noms.

Très vite aussi, elle m’a amenée sur le terrain de ses souffrances physiques, morales et affectives ainsi que dans les labyrinthes de sa solitude intérieure où tant de questions restaient sans réponse. Et puis, il y avait toutes ses interrogations dans le domaine de la foi. Dans mon cœur venait de naître pour D. une profonde amitié et beaucoup d’affection.

 

J’ai ressenti alors que le hasard n’avait rien à voir avec notre rencontre, mais qu’elle avait été guidée par Celui qui voulait devenir pour D. le Chemin, la Vérité et la Vie. À la demande de D., j’ai pu partager l’expérience de ma foi. Cette foi, qui un jour est née d’une rencontre personnelle avec Dieu et qui a pris racine dans son amour infini, en se nourrissant régulièrement de la Parole vivante et efficace de Dieu.

 

Au cours de nos rencontres, nous avons eu plusieurs fois l’occasion de lire ensemble cette Parole. Je me rappelle entre-autre cette blessure qui était la sienne, causée par la frustration du refus de son père de lui donner son nom, et du rejet dont l’enfant qu’elle était avait été l’objet de la part de ce père. Cette souffrance s’avéra une opportunité pour aborder le thème de l’adoption de Dieu qui voulait faire d’elle sa fille : non pas pour un temps seulement mais pour l’éternité en Jésus-Christ.

 

Lors de mes visites, chaque fois que les circonstances le permettaient et jusqu’au moment où elle resta consciente, D.me demandait de prier, c'est-à-dire de parler à Dieu avec elle et pour elle… et son visage se détendait ! Vers la fin, elle me disait : "Viens le soir, car la prière du soir me permet de passer une meilleure nuit." Je continuais à venir deux ou trois fois par jour et je massais ce corps décharné par la maladie avec des huiles essentielles ce qui lui procurait un certain bien-être.

 

Un soir un peu avant son départ, D. est entrée dans une souffrance physique terrible, sa mère affolée, ne sachant que faire me téléphone qu’elle n’arrivait pas à joindre le curé. J’ai proposé de venir, non avec le curé mais avec le pasteur… Si bien que Roger et moi avons pu prier pour elle et avec elle. Quelques instants plus tard, son visage se détendait, la crise s'était éloignée.

 

Juste après son décès, le curé ayant appris par la mère de D., mon accompagnement spirituel et la visite d’un pasteur, proposa pour la cérémonie religieuse que le pasteur fasse l’homélie et que je rende mon témoignage d’accompagnement. Et c’est devant 400 personnes que Roger a pu partager la Nonne Nouvelle de l’Évangile… Sans compter de nombreuses personnes dans la famille et parmi des amis, avec qui j’ai pu tisser des liens et rendre témoignage de ma foi. J’avais vraiment la confirmation que la rencontre avec D. n’était pas le fruit du hasard.

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